Distribution et traitement des images à l’ISE 2017

Alors que nous parlions l’an dernier de la forte poussée du transport de vidéos sur réseau en paquets IP standards, par opposition aux solutions point à point de type HDBaseT, l’édition 2017 d’ISE confirme cette tendance de façon marquante. Avec plusieurs offres propriétaires et un nouveau consortium de constructeurs regroupés autour d’un format standard commun. Ce n’est pas moins d’une dizaine de solutions qui éclosent aujourd’hui sur le marché. Nous faisons le point sur ces offres technologiques, tout en sachant que ce compte rendu ne reflète qu’une partie, nous espérons la plus complète, des nombreuses nouveautés présentées.
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TRANSPORT SUR IP

Nous assistons donc à une explosion de solutions pour le transport des signaux audio et vidéo sur réseau IP. Le signal vidéo numérique est difficile à transporter car une liaison HDMI est très rapidement limitée en distance.

Après les solutions telles que le HDBaseT, qui utilisent le câblage à paires torsadées de façon propriétaire et dans une topologie point à point, on a vu apparaître depuis quelque temps des produits tels que Just Add Power, ou les systèmes SVSI d’AMX basés sur plusieurs codecs de compression et donc plusieurs débits. Ils utilisent le réseau de façon classique, permettant d’utiliser des switchs standard et éventuellement de mélanger la vidéo avec d’autres données. L’intérêt de ces solutions réside dans une bonne qualité de transmission, tout en bénéficiant d’une matrice virtuelle à travers l’architecture du réseau, un signal entrant pouvant être transmis sur plusieurs sorties simultanément.

Plusieurs questions subsistent néanmoins. Quel type de réseau utiliser quand une vidéo 4K60 en mode 4:4:4 et HDR conduit à un débit de 12 Gb/s. Une première solution, pas trop chère, consiste à utiliser une compression élevée pour passer sur un réseau 1 Gb/s. En général basé sur le H.264, le traitement des images provoque un retard (ou une latence) assez important. L’alternative est d’exploiter une compression moins forte avec une latence plus faible, mais avec une infrastructure plus onéreuse car basée sur des câblages et des équipements actifs fonctionnant en 10 Gb/s.

Tous les constructeurs spécialisés dans le transport des images vidéo et informatiques s’engouffrent sur ces technologies et ce ne sont pas moins de dix solutions différentes qui ont été présentées au cours de l’ISE.

Le premier avantage de ce nouveau mode de transport est de pouvoir créer des grilles de commutation virtuelles, en lieu et place des grilles physiques, dont les coûts restent élevés et croissent au carré de leur capacité. La source raccordée au réseau est transportée vers un ou de multiples points de réception et d’affichage. Cependant, même si le principe reste identique, les offres restent spécifiques les unes des autres, car basées sur des algorithmes de compression propriétaires et une gestion des commutations et des signaux qui reste complexe. Les propositions techniques sont fort diverses avec des différences non négligeables. Toutes ces informations ne sont pas toujours clairement explicitées par les constructeurs. En voici un premier panorama.

 

KRAMER propose des encodeurs KDS-EN6 et décodeurs KDS-DEC6 permettant de créer des liens de streaming entre points d’émission et de diffusion en mode unicast ou multicast. Il transporte des images 4K60 en mode 4:2:0 avec une compression H.264 et donc une latence pour le traitement, mais fonctionnant sur un réseau 1Gb Ethernet. Un logiciel permet de gérer les liaisons et peut intégrer d’autres produits tels qu’un encodeur Amino et un lecteur vidéo soft VLC dans leur environnement.

 

CRESTRON, de son côté, propose les DM-NVX-350 et 351 ; ces produits, développés sur une base de puces Intel et conçus à la demande de Crestron, permettent un transfert d’image jusqu’à 4K60 4:4:4 sur 1Gb Ethernet sans latence visible par rapport à un HDBaseT ; le codec utilisé est propriétaire « secret ». Les interfaces font encodeur et décodeur et peuvent être utilisées alternativement dans un sens ou dans l’autre. Ce qui laisserait supposer un codage par ondelettes. Le système gère simultanément le contrôle RS232 ou infra-rouge, le HDCP, etc.

 

JUST ADD POWER, probablement la plus ancienne solution sur le marché, fonctionne sur réseau 1Gbit/s, avec des modules alimentés en PoE, et assure une latence de 22 ms, soit une trame d’image environ. Just Add Power ne précise pas le type de codec utilisé, mais assure la gestion HDCP et le support HDMI 2.0.

 

MUXLAB constructeur canadien, propose la gamme ProDigital. En deux versions : l’une en 1 Gb/s, l’autre en 10 Gb/s, avec aussi une compression en H.264. Les modules gèrent l’audio embeddé ou analogique, le contrôle RS232 et IR associés, mais ne spécifie pas si le HDCP est maintenu. Une autre version est proposée en 10 Gb/s sans compression, mais reste limitée à une image 4K60 en mode 4:2:0.

 

VISIONARY SOLUTIONS propose un transport IP en 1 Gb/s avec une latence de 30 ms, soit une trame et demie, à deux images et gère le désembeddage et l’embeddage audio numérique avec des interfaces Dante directement dans les modules.

 

BIAMP, plus connu pour ces produits audio, lance Tesira Forté Lux, encodeur et décodeur vidéo et transmission en paquets de type AVB ; le taux de compression est paramétrable suivant la qualité désirée, la vidéo devient un paramètre dans la configuration du logiciel de configuration et Tesira assure la concordance du « lipsync » à travers la transmission.

 

Le système SVSI d’AMX (HARMAN) de son côté, poursuit son développement avec des versions en Jpeg 2000 et en H.264 avec des niveaux de qualités différents pour des applications spécifiques. De plus AMX présentait une grille de commutation 6×2 avec deux slots pour cartes SVSI sous la référence NMX-PRS-N7142 permettant de mélanger commutation traditionnelle en HDMI et transport IP vers la diffusion.

RGB SPECTRUM avec la gamme ZIO, propose une solution qui utilise un format de compression standard H.264, avec une latence de trois trames. Avantage : le système s’intègre directement avec leurs produits de multiviewer et autres découpes de mur d’image.

 

Mais un autre acteur vient bousculer tout cela. APTOVISION, concepteur d’une puce électronique, a su regrouper autour de sa proposition, un consortium dont les fondateurs sont CHRISTIE, SONY, ZEEVEE, NETGEAR, sous la bannière de SDVoE (Software Defined Video over Ethernet). Cette solution fonctionne sur un réseau 10 Gb/s, et annonce une latence de traitement de 2,5 microsecondes (à confirmer). Un système est déjà disponible sous forme d’encodeur et de décodeur chez ZeeVee, et a été présenté à l’état de prototype sur le stand de Sony.

La particularité du système est qu’une image qui doit être affichée à un point de sortie en 720p forcera le point d’entrée à cette résolution. Si deux points de diffusion affichent les images dans des résolutions différentes, le point d’entrée créera deux flux séparés. Le SDVoE deviendra-t-il un standard de fait, comme le HDBaseT a réussi à le faire ? L’avenir nous le dira.

Cette effervescence autour du transport vidéo sur réseau pose la question de la pérennité du HDBaseT. En fait, ce mode de transport des images est désormais bien implanté sur de nombreux matériels et ne sera sans doute pas immédiatement abandonné. Dans l’espace d’une salle de réunion, il répond toujours efficacement au besoin de transmission, avec aujourd’hui de nombreux projecteurs équipés de ce type d’entrée de façon native. Les promoteurs du transport sur IP standard font valoir l’intérêt de leur solution, plus dans un environnement ouvert, sur des distances plus importantes, et une réduction des coûts par la suppression des grilles de commutation physique.

 

Dans cet esprit, le consortium HDBaseT n’est pas insensible à cette attaque directe sur son marché. Valens, le constructeur des puces électroniques qui assurent les fonctions HDBaseT, présentait une évolution sous forme de deux modules permettant d’injecter l’HDBaseT dans des paquets IP standard et de les faire circuler dans un réseau classique, puis de l’extraire à destination. Encore sous forme de prototype, et présenté comme une mise en scène technique, cela ressemble tout de même à une véritable contre-attaque.

À ceux qui souhaitent approfondir le sujet, il faut signaler également les propositions de DVI Gear, IPBaseT d’AURORA, le BARCO NGS, et chez ATLONA le système Omnistream.

 

Sur le stand du forum HDBaseT, le suédois FIBERSYSTEM présentait des switchs sur fibre optique et le HDBT over Fiber qui permet d’étendre la distance maximale de 100 mètres du HDBaseT sur paires torsadées, à plus de 80 km avec des liens fibres optiques HDBaseT.

 

La société UL est un fabricant de câbles de différents types : haut débit, sans halogène et faible dégagement de fumée pour les lieux publics, par exemple, PoH (Power over HDBaseT) pour limiter la puissance PoE en ligne et éviter tout échauffement.

 

Enfin, la société VALENS, concepteur du HDBaseT propose un équipement capable de transmettre un flux vidéo 4K60 en mode 4:4:4 sur un réseau HDBaseT sur une distance de 100 mètres, avec une compression sans pertes visibles et une faible latence.

 

 

TRAITEMENT VIDÉO ET DISTRIBUTION SIGNAUX

ANALOG WAY complète les fonctionnalités du VIO 4K, son châssis convertisseur/scaler multiformat. Il permet de traiter tous types de signaux, toutes résolutions en entrée/sortie au format désiré jusqu’au 4K60 4:4:4. En option, le châssis reçoit des cartes additionnelles, en Dante pour une gestion audio séparée, ou des cartes de sortie supplémentaires de différents formats (DVI, HDMI, 3G-SDI) avec un maximum de trois sorties.

Par ailleurs était présenté le boîtier de contrôle RCU-300 qui gère des rappels de presets et de transitions sur un ou plusieurs processeurs d’image Analog Way. Il est destiné à des applications pour des murs d’image ou d’écrans à Led et remplace un pupitre plus complexe pour des installations fixes.

 

LINDY développe son catalogue de produits vidéo, avec des grilles de commutation de 8×8 à 32×32, configurables par tranche de 8 in ou 8 out avec des cartes, HDMI, DVI, ou HDBaseT, pour adapter au mieux la configuration à l’application finale.

 

THEATRIXX TECHNOLOGIES est une société canadienne qui venait pour la première fois en Europe pour présenter Xvision, une gamme de modules d’interface vidéo SDI/Fibre, Fibre/SDI, HDMI/HDBaseT, HDBaseT/HDMI… Ces modules sont conçus pour un usage en événementiel ou dans les théâtres, avec un connecteur d’alimentation PowerCon à verrouillage, un châssis en aluminium permettant de glisser une accroche de sécurité, le tout dans un boîtier très rigide et équipé d’un fort aimant permettant de faire tenir les modules entre eux sans autre fixation. Ayant rencontré des distributeurs européens lors du salon, ces produits devraient être disponibles rapidement chez nous.

 

OPTICIS est spécialisé dans les composants fibre optique pour l’extension, la distribution et la commutation de signaux vidéo. Le constructeur coréen propose un convertisseur multiformat (vidéo composite, DVI, VGA) capable de multiplexer ces signaux sur une seule fibre optique en multimode sur 500 mètres. Il propose un nouveau décodeur/convertisseur IPDC-100 multisources (caméra IP, PC, vidéo H.264), sorte de média player capable de transporter l’audio et la vidéo sur un réseau IP 10/100 Base-T et supportant le 1080p 60 Hz avec fonction PIP, Quadview, et scrolling de textes.

 

MURIDEO propose une gamme de systèmes de tests et de mesures vidéo HDMI. Son générateur Fresco SIX-G fournit des signaux 4K 12 bits Rec. 2020 sur une sortie HDMI 2.0a à 18 Gb/s et cryptage HDCP 2.2. Il fonctionne avec l’analyseur SIX-A capable d’analyser le timing du signal, la bande passante TMDS et les métadonnées HDR.

Le processeur Prisma traite les signaux vidéo avec des LUT 3D et pour la première fois les signaux HDR. Le nouveau couple de générateur/analyseur Fox and Hound, annoncé pour le second trimestre 2017, sert à contrôler tous les paramètres d’une liaison HDMI jusqu’au 4K.

 

BARCO a profité de l’ISE pour présenter Overture, une application de gestion centralisée qui comprend une application qui tourne sur un serveur central et qui « monitore » tous les devices d’une entreprise. Aucune programmation n’est nécessaire, l’installation se fait par configuration. Overture dispose d’une base de données de tous les appareils et est compatible avec toutes les marques. Il suffit de placer un « driver » sur chaque appareil qui n’est pas de la marque Barco, ce « driver » va faire la traduction du langage du constructeur vers le langage Barco. La connexion se fait en Ethernet ou par des convertisseurs IP.

Le marché visé est celui des grandes entreprises, des universités, des Palais de Congrès, des musées, en fait de toutes les sociétés ou lieux accueillant du public et qui doivent gérer des matériels hétérogènes. Overture est une solution intéressante pour les intégrateurs qui peuvent vendre leurs services de gestion à ceux de leurs clients qui ne veulent pas prendre en charge ces opérations en interne. En termes de commercialisation, Overture se vend par salle, quel que soit le nombre d’appareils présents dans une salle.

Overture est un système centralisé. Par conséquent, il suffit d’un seul serveur par entreprise, même si Overture est utilisé dans différents endroits du monde. Dans chaque site, le logiciel installé sur un simple ordinateur gère les appareils de communication locaux. En ajoutant des alertes, l’équipe d’assistance peut être avertie lorsque certains événements se produisent, par exemple si un projecteur est en surchauffe, afin d’agir immédiatement. Et, étant donné qu’Overture contrôle de façon centrale les équipements audiovisuels, le personnel technique peut dépanner et régler les problèmes des équipements de toute l’entreprise à distance, à l’aide du centre d’assistance d’Overture, ce qui permet de réduire de manière conséquente le temps dédié à la résolution et à l’intervention sur site.

En outre, l’interface utilisateur HTML5 de la salle de réunion, utilisée pour contrôler tous les appareils connectés de la salle, peut être déployée sur n’importe quel appareil doté d’une connexion au réseau et d’un navigateur web. Les unités de contrôle et panneaux tactiles propriétaires coûteux deviennent dès lors inutiles. Enfin, puisque le système est configuré, et non programmé, l’interface utilisateur se présente et fonctionne de manière identique dans chaque salle de réunion et sur chaque site, ce qui permet d’optimiser l’expérience utilisateur.

 

Extrait de notre compte-rendu de l’ISE 2017 paru pour la première fois dans Sonovision #7, p. 22-38. Abonnez-vous au magazine Sonovision (1 an • 4 numéros + 1 hors-série) pour accéder, dès leur sortie, à nos articles dans leur intégralité.


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