La réalisation vidéo mapping à portée de main avec HeavyM

Démocratiser le vidéo mapping… Telle est l’ambition affichée de la startup Digital Essence fondée en 2014 par Etienne Mathé et Arnaud Berthonneau. Alors étudiants à l’école d’ingénieur à l’ECE Paris, c’est en allant à un concert d’Amon Tobin qu’ils découvrent le mapping scénique synchronisé avec la musique du DJ brésilien. De cette expérience visuelle et sonore naît alors l’idée de proposer un logiciel, HeavyM, permettant à tous de pouvoir s’initier au vidéo mapping. S’ensuit la création de leur startup et maintenant une campagne de crowdfunding sur Wiseed pour accompagner la société dans son développement et prendre part à son capital. La clôture de la campagne initialement prévue au 7 avril a été étendue jusqu’à la fin du mois d’avril en raison du contexte actuel de la crise sanitaire liée au covid-19.
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Etienne Mathé, son président nous en dit plus sur cette société qui vient se positionner sur le marché porteur qu’est celui du « phygital »…

 

Sonovision : Le vidéo mapping, est-ce quelque chose que vous connaissiez à la base ?

Etienne Mathé : Pas du tout ! C’est en allant à un concert d’Amon Tobin que nous avons découvert ce type de projection. Nous avons été totalement fascinés. Nous nous sommes dit que c’était vraiment l’avenir. Tous les artistes allaient avoir besoin de ces technologies. En essayant de le produire nous-même, nous nous sommes vite rendu compte que c’était un travail de motion designer ou de spécialiste en animation. Ce n’était pas à notre portée et il y avait un problème de compétence. Si nous avons eu cette réflexion, cela signifie que d’autres l’ont eu aussi. C’est à partir de là que nous avons conçu HeavyM, un logiciel capable de générer des animations pour de la vidéo projection qui soit aussi simple d’utilisation que PowerPoint, Paint ou Keynote par exemple. Son ergonomie est simple et compréhensible par des non spécialistes. Une bibliothèque d’animations existe et il suffit de piocher dans une palette d’effets existants. Surtout, les effets sont en temps réel. C’est à dire qu’il n’y pas besoin de phase de calcul pour voir le rendu. Nous voyons de manière instantanée ce que cela va produire sur scène. L’avantage, c’est qu’il n’y a pas de rupture dans le processus de création.  

 

S. : Le logiciel se synchronise aussi avec la musique. Comment cela se passe ?

E. M. : Avec la musique, le micro de l’ordinateur va capter un signal et cette musique va être analysée en direct. L’ordinateur va ainsi pouvoir synchroniser les variations de la musique sur les variations des animations visuelles.

 

S. : HeavyM est-il compatible sur tous supports ?

E. M. : Notre volonté est de démocratiser la technique du vidéo mapping. La majorité de nos clients potentiels ne peut pas se permettre d’acheter des solutions professionnelles comme un serveur multimédia à 10 000 euros. Notre solution marche donc sur ordinateur grand public, que ce soit PC ou Mac.  

 

S. : Justement, quels sont vos tarifs ?

E. M. : L’abonnement mensuel est de 35 euros par mois sans engagement. Cela donne accès au logiciel, à toutes les mises à jour et nous accompagnons nos clients par email en cas de question. Cette offre est dédiée plutôt aux clients qui ont un besoin épisodique, pour un projet de quelques mois par exemple.

Une autre offre est disponible pour les clients qui ont besoin plus récurent. Dans ce cas-là, il s’agit d’une licence à 299 euros pour une durée illimitée et un an de mises à jour. Au-delà d’une année, il faut repayer 89 euros pour avoir accès aux mises à jour.

 

S. : Aujourd’hui, comment se structure votre société ?

E. M. : Nous sommes six salariés et Digital Essence se divise en trois pôles. Le pôle technique est composé de développeurs logiciels qui publient des mises à jour régulières. Ensuite nous avons un pôle design produit où l’équipe travaille sur les besoins des utilisateurs pour faire en sorte que le logiciel soit le plus facile à utiliser. Puis le pôle marketing se charge de produire du contenu vidéo ou textuel afin de diffuser l’information au maximum, dans le but de faire découvrir HeavyM et structurer la communauté. J’ajouterai qu’il y a un quatrième pôle, événementiel, qui est étroitement lié au marketing où des prestations sont réalisées pour mettre en avant notre logiciel avec par exemple des installations pour des marques comme Kenzo, Google ou Mercedes. Mais ce n’est pas notre cœur de métier, il s’agit plus de notre vitrine et cela permet de rester au contact du marché pour en faire remonter les besoins.

 

S. : Vous êtes actuellement soutenus par plusieurs institutions… Pouvez-vous nous dire comment cela se manifeste ?

E. M. : Nos locaux sont dans une pépinière d’entreprises à Montreuil gérée par Est ensemble qui est rattaché à la région. Cela nous donne accès à des bureaux avec un loyer accessible et une gestion du courrier. Nous sommes aussi accompagnés par la Bpifrance. Au niveau financier, cela nous permet d’avoir un accès facilité à des prêts bancaires ou des subventions. Nous avons enfin le soutien du CNC par rapport à notre développement lié à l’image animée. Via le Fonds RIAM, ils nous ont aidé sur nos projets de R&D.

 

S. : Vous comptez désormais 60 000 utilisateurs à travers le monde, plus de 5000 licences vendues et quelques dizaines d’ambassadeurs…

E. M. : Depuis le lancement de HeavyM, nous avons toujours constitué notre communauté dans une logique de démocratisation et de proximité. Nous mettons un point d’honneur à être disponibles pour nos clients par mail, par tchat ou par les réseaux sociaux. Lorsque nous avons dépassé le cap des 2 000 clients, la nécessité de structurer la communauté s’est faite ressentir car le nombre de sollicitations augmentait proportionnellement. Au lieu de conserver une organisation verticale, nous souhaitons au maximum privilégier une organisation décentralisée. L’idée d’avoir des ambassadeurs de notre solution est apparue adéquate pour pouvoir transmettre l’information à un maximum de personnes. Nous avons donc recruté des ambassadeurs parmi nos clients, devenus des référents pour les autres utilisateurs.

 

S. : Vous avez établi tout récemment en 2020 un partenariat avec Optoma… Qu’est-ce qui a justifié le rapprochement avec cette marque ?

E. M. : Ils ont de très bons projecteurs d’entrée et de milieu de gamme aux alentours de 1000 euros qui sont de très bonne qualité et de très bonne résolution. Cela fait sens pour notre cœur de cible, ce sont des projecteurs qui demeurent accessibles. Il y aura donc un pack comprenant un vidéo projecteur Optoma avec HeavyM accessible dès la rentrée prochaine.

 

S. : Au niveau de vos clients, 25% de vos clients sont de nationalité française alors que 30% sont américains. Comment l’expliquez-vous ?

E. M. : Aux Etats-Unis, le storytelling, l’événementiel et le marketing expérientiel sont beaucoup plus développés que partout ailleurs. Les américains ont un grand intérêt pour le vidéo mapping car cela crée une expérience beaucoup plus forte pour le public. C’est un moyen de dynamiser une communication. Aujourd’hui les Etats-Unis sont en recherche de ce genre de solutions beaucoup plus qu’en Europe. On dit que les Etats-Unis ont toujours 5 ans d’avance sur tout le monde, cela reste vrai pour le vidéo mapping.

 

S. : Vous effectuez en ce moment même une campagne de crowdfunding sur Wiseed. Pouvez-vous nous en dire plus ?

E. M. : Oui, à l’origine elle aurait dû se clôturer le 7 avril. Nous avons fait le choix de repousser l’échéance jusqu’à fin avril au vu des événements liés au covid-19. Nous avons à ce jour (fin mars, ndlr) récolté 170 000 euros auprès de plus de 250 investisseurs qui sont pour la majorité français. Cela va nous permettre de consolider l’entreprise et de finaliser le développement d’une toute nouvelle version de HeavyM.

 

S. : Qu’est-ce que vous allez proposer et améliorer dans cette deuxième version ?

E. M. : Elle sortira à la rentrée. De nouveaux effets visuels seront disponibles et les possibilités créatives seront donc plus importantes. Nous effectuons un véritable travail sur les performances visuelles. La version 2 sera aussi davantage compatible avec les standards professionnels. HeavyM a bien marché auprès des artistes amateurs ou artistes semi-professionnels, j’entends par là des DJ qui mixent pour moins de 1000 personnes pour des mariages par exemple. Nous voyons maintenant des prestataires techniques professionnels s’équiper de notre solution car ils ont souvent des besoins simples auxquels réponds très bien HeavyM. La version 2 sera donc accessible avec une offre dédiée aux professionnels proposant notamment une comptabilité avec les standards de l’industrie audiovisuelle dont surtout le NDI. Cette technologie permet de router des signaux vidéo entre différents logiciels. Nous nous devions d’être compatible avec ce standard pour pouvoir nous intégrer dans un environnement déjà existant.  

 

S. : Pour finir, avez-vous d’autres développements prévus ?

E. M. : Nous avons travaillé avec Free pour leur nouvelle boutique à Paris Bastille. Free souhaitait valoriser sa nouvelle Freebox d’une manière innovante. La nouvelle Freebox est conçue avec Devialet pour le son. Il fallait mettre en avant les fonctionnalités et innovations du produit. Nous avons alors imaginé une installation de vidéo projection qui vient décomposer la Freebox et rendre apparent les enceintes et le logo Devialet. Nous avons travaillé avec des architectes d’intérieur pour créer un décor. Une fois validé, nous avons collaboré avec des infographistes membres de notre communauté. Ils ont produit un effet sur mesure pour coller au plus près du brief créatif. Dans le prolongement de ce projet, nous envisageons une activité qui puisse être axé sur des installations permanentes. Mais pour nous cela reste aujourd’hui un marché secondaire à l’événementiel.

 

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